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La Télévision n'est pas la réalité

L'ennui avec la télévision, c'est qu'on la regarde pour se changer les idées et qu'elle finit par nous laver le cerveau. La télévision a une sorte de monopole de fait sur la formation des cerveaux d'une partie très importante de la population. L'industrie de la télévision n'aime pas voir la complexité du monde. Elle préfère les idées et les concepts simples : c'est blanc, c'est noir ; c'est bon, c'est mauvais. La télé, ce chewing-gum de l'oeil, a multiplié les crétins... Le problème est que les crétins ont beau avoir toujours existé, avec la télévision, ils se sont multipliés. Il ne faut jamais oublier que la télévision n'est qu'un appareil électroménager

Pierre Bourdieu Sur la Télévision

"Il est évident qu'il y a des choses qu'un gouvernement ne fera pas à Bouygues sachant que Bouygues est derrière TF1. Ce sont là des choses tellement grosses et grossières que la critique la plus élémentaire les perçoit, mais qui cachent les mécanismes anonymes, invisibles, à travers lesquels s'exercent les censures de tous ordres qui font de la télévision un formidable instrument de maintien de l'ordre symbolique."Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996, page 14

"Les prestidigitateurs ont un principe élémentaire qui consiste à attirer l'attention sur autre chose que ce qu'ils font. Une part de l'action symbolique de la télévision, au niveau des informations par exemple, consiste à attirer l'attention sur des faits qui sont de nature à intéresser tout le monde, dont on peut dire qu'ils sont omnibus - c'est-à-dire pour tout le monde. Les faits omnibus sont des faits qui, comme on dit, ne doivent choquer personne, qui sont sans enjeu, qui ne divisent pas, qui font le consensus, qui intéressent tout le monde mais sur un mode tel qu'ils ne touchent à rien d'important."
Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996, page 16

"La télévision a une sorte de monopole de fait sur la formation des cerveaux d'une partie très importante de la population. Or, en mettant l'accent sur les faits divers, en remplissant ce temps rare avec du vide, du rien ou du presque rien, on écarte les informations pertinentes que devrait posséder le citoyen pour exercer ces droits démocratiques."
Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996, page 18

"On dit toujours, au nom du credo libéral, que le monopole uniformise et que la concurrence diversifie. Je n'ai rien, évidemment contre la concurrence, mais j'observe seulement que, lorsqu'elle s'exerce entre des journalistes ou des journaux qui sont soumis aux mêmes contraintes, aux mêmes sondages, aux mêmes annonceurs (il suffit de voir avec quelle facilité les journalistes passent d'un journal à l'autre), elle homogénéise."
Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996, page 23

"L'audimat, c'est cette mesure du taux d'audience dont bénéficient les différentes chaînes (il y a des instruments, actuellement, dans certaines chaînes qui permettent de vérifier l'audimat quart d'heure par quart d'heure et même, c'est un perfectionnement qui a été introduit récemment, de voir les variations par grandes catégories sociales). On a donc une connaissance très précise de ce qui passe et de ce qui ne passe pas. Cette mesure est devenue le jugement dernier du journaliste, jusque dans les lieux les plus autonomes du journalisme, à part peut-être Le Canard Enchaîné, Le Monde diplomatique, et quelques petites revues d'avant-garde, animées par des gens généreux et "irresponsables", l'audimat est actuellement dans tous les cerveaux."
Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996, pag 28

"Vous avez des professionnels du plateau, des professionnels de la parole et du plateau, et en face d'eux des amateurs (ça peut être des grévistes qui, autour d'un feu de bois vont...), c'est d'une inégalité extraordinaire. Et pour établir un tout petit peu d'égalité, il faudrait que le présentateur soit inégal, c'est-à-dire qu'il assiste les plus démunis relativement, comme nous l'avons fait notre travail d'enquête pour La Misère du monde."
Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996, page 36

"Poussées par la concurrence pour les parts de marché, les télévisions recourent de plus en plus aux vieilles ficelles des journaux à sensation, donnant la première place, quand ce n'est pas toute la place aux faits divers ou aux nouvelles sportives..."
Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996, page 59

"On peut et on doit lutter contre l'audimat au nom de la démocratie. Ça paraît presque paradoxal parce que les gens qui défendent l'audimat prétendent qu'il n'y a rien de plus démocratique (c'est l'argument favori des annonceurs et des publicitaires les plus cyniques, relayés par certains sociologues, sans parler des essayistes aux idées courtes, qui identifient la critique des sondages - de l'audimat - à la critique du suffrage universel, qu'il faut laisser aux gens la liberté de juger, de choisir ("ce sont vos préjugés d'intellectuels qui vous portent à considérer tout ça comme méprisables"). L'audimat, c'est la sanction du marché, de l'économie, c'est-à-dire d'une légalité externe et purement commerciale, et la soumission aux exigences de cet instrument de marketing est l'exact équivalent en matière de culture de ce qu'est la démagogie orientée par les sondages d'opinion en matière de politique. La télévision régie par l'audimat contribue à faire peser sur le consommateur supposé libre et éclairé les contraintes du marché, qui n'ont rien de l'expression démocratique d'une opinion collective éclairée, rationnelle, d'une raison publique, comme veulent le faire croire les démagogues cyniques."
Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996, page 77

"La télévision a une sorte de monopole de fait sur la formation des cerveaux d'une partie très importante de la population."
Pierre Bourdieu - 1930-2002 - Sur la télévision - 1996